L’Eclat Numéro 09
par
Septembre 2013
Un antifascisme libertaire.
L’assassinat de Clément Méric a attiré l’attention du grand public et des médias sur la dangerosité des groupuscules fascistes qui sévissent un peu partout en France. Pourtant, cet événement tragique s’inscrit dans la continuité d’une longue liste d’exactions que dénoncent régulièrement des collectifs comme le collectif de vigilance 69.
Il semble inutile de revenir ici sur l’hypocrisie des discours que l’on a pu entendre après la mort de Clément Méric. Il est préférable de nous interroger sur le type d’action antifasciste que nous pouvons mener, ici et maintenant, en tant que libertaires.
Les groupuscules fascistes : un arbre qui cache la forêt.
Le Front National, soucieux de revêtir les frusques d’un parti respectable, s’est démarqué maladroitement, de groupuscules comme Troisième Voie ou les JNR. Mais ces dénégations ne trompent personne : malgré les divergences et les conflits internes, il existe bien une unité idéologique qui cimente l’extrême droite. Quelles que soient leurs différences, le nationalisme, le racisme et la xénophobie constituent leurs fond de commerce.
Face à cela, la gauche s’est contentée de deux réponses : l’une, de type administratif et législatif, l’autre de type républicain. Le 10 juillet, le gouvernement a dissous par décret Troisième voie, les JNR et Envie de rêver. Cette interdiction est de pure forme : rien n’empêchera ces groupes de se reformer sous une autre appellation. De plus, focaliser l’attention sur ce groupuscules, certes dangereux, c’est fermer les yeux sur une fascisation rampante dont les partis politiques
républicains sont pleinement responsables.
Le piège à con du front républicain.
L’autre réponse, usée jusqu’à la corde, consiste à ressusciter le fameux front républicain qui permit à Chirac de se faire élire en 2002. Ce front républicain se fonde sur une double illusion. En premier lieu, on croit (ou fait semblant de croire) qu’il y aurait deux droites : l’une infréquentable, celle du Front National, l’autre humaniste et républicaine, avec laquelle on pourrait partager certaines valeurs. Comme si la droite et l’extrême droite n’étaient pas deux variantes d’une même politique visant à perpétuer l’exploitation capitaliste ! Comme si Sarkozy et Guéant n’avaient pas appliqué une bonne partie du programme du FN lorsqu’ils étaient au pouvoir !
Ensuite, on s’illusionne lorsque l’on croit (ou fait semblant de croire ) qu’il existerait des valeurs républicaines dignes d’être défendues : la République et tout son fatras de rituels et de litanies (14 juillet, Liberté, Égalité, Fraternité) n’est qu’une forme de domination politique indissociable du capitalisme. Et la gauche au pouvoir l’illustre bien.
Quand la gauche fait passer les plats, le FN n’a plus qu’à se servir.
Le PS et ses alliés ont une lourde responsabilité dans la propagation des idées fascistes. Déjà, en 1984, alors qu’il était premier ministre, Laurent Fabius déclarait : « Le Front national pose les bonnes questions mais apporte les mauvaises réponses. » Non content de renoncer au socialisme, le PS reprend sans vergogne les thèmes favoris du FN : discours sécuritaire, stigmatisation des immigréEs, exaltation des vertus patriotiques. Tandis que Valls, champion de la matraque humaniste, bat le record d’expulsions détenu par son prédécesseur, l’impayable Montebourg, ministre du développement productiviste, se fait le chantre du patriotisme économique . Le FN n’a qu’à laisser faire : le PS agit à sa place. Marine Le Pen raille l’UMPS. Elle serait plus près de la vérité en parlant de FNUMPS ! C’est ainsi que l’on a pu voir, lors d’une audience au tribunal d’instance de Bourg en Bresse des propriétaires de garages, demandant l’expulsion de demandeurs d’asile, soutenus à la fois par la Mairie PS de Bourg et par des responsables du FN, le tout au nom du sacro-saint droit de propriété.
Pour un antifascisme de classe.
Si nous combattons le fascisme, ce n’est pas au nom d’un idéal républicain dans lequel nous ne nous reconnaissons pas. Notre antifascisme est un antifascisme de classe : le FN et ses succursales sont avant tout les ennemis du prolétariat. Le fascisme est la dernière issue lorsque le capitalisme ne peut se maintenir dans la sérénité du dialogue social. Par ailleurs, notre antifascisme est nécessairement internationaliste : c’est bien parce que les prolétaires n’ont pas de patrie que nous rejetons tout ce qui peut ressembler, de près ou de loin à l’exaltation du sentiment national.