Dossier : la pauvreté dans les territoires périurbains
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Les cas d’Ambérieu-en-Bugey et de Saint-Rambert-en-Bugey
Bien qu’aujourd’hui la pauvreté se concentre encore majoritairement dans les centres urbains, elle n’est pas cantonnée à ces territoires. Elle se diffuse au rythme des mouvements de population, notamment en suivant le processus de périurbanisation. Désormais, c’est loin de la ville, dans l’espace périurbain et rural que se localise la pauvreté.
Est considérée comme périurbaine toute commune dont plus de 40 % de la population part travailler dans un pôle urbain. Environ la moitié des communes de Rhône-Alpes est concernée.
Parmi l’impressionnant chiffre des 374 communes de l’Ain (sur 410) sur lesquelles l’Insee a pu calculer un score de précarité, Saint-Rambert-en-Bugey est la 7ème commune qui enregistre le score le plus fort, et Ambérieu-en-Bugey la 26ème. Ces deux villes sont donc caractéristiques d’une situation plus générale.
Au vu des résultats des dernières élections départementales il faut nous interroger sur les raisons qui peuvent expliquer les taux d’abstention record de 50% mais frôlant les 70% dans certains quartiers. C’est cette désintégration du tissu économique, social et culturel qui permet aux borgnes du FN d’apparaître rois au royaume des aveugles et des sourds.
Enfin cela devrait aussi nous aider à mieux saisir les moyens que nous pourrons mettre en œuvre pour endiguer cette résignation ambiante et donner une orientation émancipatrice à l’abstention.
Diffuse ou par poches la pauvreté est bien là !
La pauvreté, bien ancrée sur les deux communes, ne se répartit pourtant pas de la même manière.
Sur Saint-Rambert-en-Bugey, la pauvreté est plutôt diffuse alors que sur Ambérieu-en-Bugey, elle est davantage localisée et suit une logique de quartiers bien spécifiques tels que les tours Noblemaire ou les Pérouses situées dans le quartier de la gare, et certains secteurs du quartier du Tiret. Par ailleurs l’existence d’une population, souvent très jeune, en rupture familiale, non originaire d’Ambérieu-en-Bugey ou de ses alentours, est très inquiétante, en particulier pour les moins de 25 ans qui ne peuvent bénéficier du RSA et sont de ce fait encore plus atomisés.
Autre fait marquant qui caractérise les deux communes : l’implantation forte et historique de populations immigrées. C’est plus précisément dans les quartiers « pauvres », les anciennes citées ouvrières, que vit une forte proportion de populations immigrées. Par exemple, le Centre social le Lavoir situé dans le quartier des tours Noblemaire, est fréquenté par 160 jeunes dont 90% ont des parents d’origine étrangère.
Un accès aux services beaucoup plus développé sur Ambérieu-en-Bugey
Qu’en est-il de l’accessibilité et des services dans ces deux communes ?
La ville d’Ambérieu-en-Bugey comprend à ce jour plus de 15 000 habitants. Elle est située à moins de 45 minutes de Lyon en voiture et moins de 30 minutes en TER sur les lignes reliant Lyon à Annecy, Genève et Chambéry. Sa situation géographique ainsi que la présence de la gare sont profitables à la commune et lui procurent un dynamisme intéressant. La Ville a développé un réseau de 3 bus nommé TAM en circulation 6 jours par semaine et bénéficie de tous les services : commerces, clinique, pôle emploi, CAF, etc.
Saint-Rambert-en-Bugey, commune de 2100 habitants située à 12 kilomètres environ à l’est d’Ambérieu-en-Bugey, dans la vallée de l’Albarine, ne dispose que d’un nombre de commerces et de services limités (boulangerie, tabac, restaurants, supermarché, poste etc.). Une gare est implantée mais elle est moins desservie, ce qui implique la difficulté de se déplacer en dehors des horaires de passage des trains. Les lignes de transports reliant Saint-Rambert à Ambérieu se limitent donc à quelques trains et des cars en période scolaire, ce qui induit une dépendance à la voiture très importante. L’accès aux aides sociales et aux soins spécifiques nécessite souvent un déplacement à Ambérieu-en-Bugey. Tout ce qui est suivi médical, psychologique, est compliqué et il n’y a pas de spécialistes à Saint-Rambert-en-Bugey.
Des héritages spécifiques
Depuis le déclin industriel, datant des années 1980, les deux communes ont géré différemment leur territoire et Ambérieu-en-Bugey a été moins handicapée en partie du fait d’une meilleure desserte par le chemin de fer. Ce dernier a également favorisé et favorise encore l’arrivée de populations. Récemment, le nombre d’habitants y a augmenté beaucoup plus fortement que sur la région. La population s’est accrue de 16,8 % entre 1999 et 2009 sur la commune, contre 9,4 % en Rhône-Alpes. Le déclin industriel conjugué à l’augmentation de la population sur le territoire confirme la présence du phénomène de périurbanisation.
Saint-Rambert-en-Bugey connaît une importante rotation de sa population. Entre 2003 et 2008, près de 1 500 nouvelles personnes sont arrivées sur la commune, ce qui n’est pas sans poser des problèmes.
Saint Rambert-en-Bugey zone de relégation d’Ambérieu-en-Bugey
L’histoire des communes permet de comprendre l’existence d’une pauvreté « ancrée » sur ces territoires, cette dernière touchant des personnes qui y ont toujours vécu.
Cependant, il semble qu’une part de la pauvreté provienne de l’installation de nouveaux ménages qui, soit, connaîtraient déjà une situation de pauvreté avant leur installation, soit se précariseraient sur le territoire d’accueil. L’évolution de la population sur Ambérieu-en-Bugey et la forte rotation démographique sur Saint-Rambert-en-Bugey témoignent d’un accueil important de nouvelles populations sur ces deux communes. Comment expliquer ces arrivées de populations ?
Une analyse des mouvements migratoires entre 2003 et 2008 permet de rendre compte de la diversité d’origine des nouveaux habitants de ces deux communes. Près d’un quart des Rambertois de 2008 n’habitaient pas la commune cinq ans auparavant. La part de « nouveaux arrivants » est encore supérieure sur Ambérieu-en-Bugey puisqu’elle concerne 29 % des Ambarrois.
Un point marquant est la faible part de nouveaux habitants en provenance du Rhône, et donc potentiellement lyonnais. Entre 12 % et 13 % des nouveaux habitants de ces deux communes habitaient le Rhône auparavant et seulement entre 5 % et 7 % Lyon même. L’exode urbain lyonnais est donc loin d’expliquer les migrations observées sur ces deux communes.
Les migrations démographiques semblent plus fortement provenir de territoires proches. En effet, les nouveaux habitants proviennent majoritairement d’une autre commune de l’Ain. Cela se vérifie encore plus fortement sur Saint-Rambert-en-Bugey. Les migrations géographiques entre les deux communes sont, à ce sujet, intéressantes à analyser. Si la part de nouveaux Ambarrois anciennement Rambertois est marginale (2 %), la part de nouveaux Rambertois anciennement Ambarrois est, quant à elle, importante (13 %). Ainsi, entre les deux communes, les migrations s’opèrent fortement d’Ambérieu-en-Bugey vers Saint-Rambert-en-Bugey.
Cette dernière commune peut être qualifiée de territoire de relégation d’Ambérieu-en-Bugey.
S’agit-il de populations pauvres ? Qu’est-ce qui les motive à s’installer sur ces territoires ?
Un phénomène d’immigration intérieure proche et éloignée
En dehors des territoires proches, les migrations extérieures plus lointaines sont tout de même fréquentes sur Ambérieu-en-Bugey qui compte près de 30 % de ses nouveaux arrivants en provenance de l’étranger ou d’une région non limitrophe à Rhône-Alpes. Sur Saint-Rambert-en-Bugey, ces migrations venant de « l’extérieur » sont beaucoup plus marginales puisqu’elles correspondent à 16 % des nouveaux arrivants sur la commune.
Ainsi, Ambérieu-en-Bugey semblerait bénéficier d’une notoriété beaucoup plus lointaine que Saint-Rambert-en-Bugey, davantage choisie par de proches voisins.
L’attractivité du coût du logement
La première raison de ces migrations est celle de l’attractivité du coût du logement sur les deux communes, en particulier sur Saint-Rambert-en-Bugey. La pauvreté s’explique par de l’habitat peu cher. Il y a une réalité qui est que les logements sociaux et privés sont moins chers, les propriétaires privés louent plus facilement à des personnes en difficulté et de fait se retrouvent là des gens qui ont connu une procédure d’expulsion, provenant du sud ou du nord.
Ces personnes à revenus modestes s’installent dans des appartements vétustes, mal isolés, ce qui explique en partie la rotation de ces populations, car au bout d’une année les gens se rendent compte que ça coûte trop cher, les logements sont énergivores.
L’attirance d’un cadre naturel
Le prix du logement n’est pas l’unique hypothèse évoquée pour expliquer l’arrivée des habitants sur Saint-Rambert-en-Bugey. Le cadre naturel de la commune semble également attirer, dans un contexte de retour à la nature il y a des gens qui font le choix de venir habiter ici car le cadre est sympathique et peut-être espèrent-ils y trouver un havre de paix pour enfin se poser.
L’attractivité économique de la Plaine de l’Ain
Le principal motif évoqué est celui de l’attractivité économique de la Plaine de l’Ain proche d’Ambérieu-en-Bugey. Il s’agit en fait du parc industriel situé à Saint-Vulbas, appelé PIPA (Parc Industriel de la Plaine de l’Ain) qui s’étend sur une superficie de 900 hectares, où sont implantées 134 entreprises, avec plus de 4500 emplois. Le PIPA bénéficie du dynamisme de la deuxième région économique de France avec un bassin d’emploi de plus de 2,9 millions d’actifs.
Le logement, reflet de la classe sociale habitante
Le développement de l’habitat individuel explique également le mouvement de périurbanisation. En effet, à partir des années 1970, les politiques du logement ont souvent cherché à favoriser l’accession à la maison individuelle : l’acquisition ou la construction d’une maison était fortement investie sur le plan symbolique et social. Elle venait matérialiser la réussite sociale et exprimer la fierté que l’on pouvait en retirer en la donnant à voir, dans une logique d’exposition de soi aux autres. Elle était un signe de distinction sociale, également investie d’une forte dimension patrimoniale.
Aujourd’hui, l’espace périurbain a évolué, notamment depuis la relance de l’accession sociale à la propriété avec les Prêts à Taux Zéro (PTZ) et la construction de logements sociaux sur ces territoires. Ainsi, les plus modestes peuvent espérer accéder à la propriété ou accéder à un logement social plus grand pour un prix plus abordable.
Ceci étant, les contraintes de localisation sont plus difficiles à gérer pour ces groupes qui vont voir leur périmètre de déplacement se réduire considérablement, les cloisonnant dans des territoires dont ils deviennent dépendants.
Ainsi, l’utopie périurbaine des années 1960, va petit à petit mettre en lumière des enjeux nouveaux, auxquels les populations ne sont pas préparées.
Ambérieu-en-Bugey manque de logements sociaux
Ambérieu-en-Bugey manque de logements sociaux. Pourtant le parc locatif est plutôt conséquent (20,1% de résidences principales en location type HLM alors que la moyenne de Rhône Alpes est de 14,4%) mais reste en deçà des besoins. La demande est largement supérieure à l’offre et il y a 350 dossiers en attente chez chaque bailleur. La pénurie de logement est connue en mairie, mais celle-ci manque de moyens pour répondre aux besoins. A noter que la Ville ne dispose pas de service logement. Les professionnels sont conscients du délai d’attente trop long auquel doivent faire face les demandeurs. Il est toutefois moindre quand il s’agit d’une accession à des logements dits « Label prioritaire », réservés par la Préfecture pour des personnes répondant à un certain nombre de critères (séparation, violence, sortie d’un hôpital psychiatrique, etc.).
Autre difficulté mentionnée, le parc locatif social semble souffrir d’une faible rotation. Le fait que les habitants des logements sociaux soient ancrés depuis des décennies dans leur habitat, entraîne une dégradation progressive des logements et de l’image de leurs quartiers.
Un clivage de la commune rappelant les réalités économiques
Cet ancrage de populations pauvres dans certains quartiers de la commune est manifeste au sein du quartier de la gare à Ambérieu-en-Bugey (tours Noblemaire, les Pérouses, la Barbotière), qui fait référence au passé cheminot de la ville car il s’agit d’anciennes cités ouvrières. Ces dernières sont situées sur le « bas » de la commune, séparée par la ligne de chemin de fer. La notion de clivage de la commune prend ici tout son sens. Ainsi, un effet de quartier est très présent à Ambérieu-en-Bugey, rappelant certaines caractéristiques d’une pauvreté urbaine. Le développement de quartiers pavillonnaires renforce cette réalité de clivage. À ce propos, le « haut » d’Ambérieu-en-Bugey est un quartier appelé le petit « Beverly Hills » dont l’appellation laisse imaginer le type de villas qui s’y trouvent. Les différences sociales semblent donc fortement marquées sur cette commune.
Il faut aussi noter l’augmentation de dossiers de surendettement, ou dossiers CCAPEX (Commission départementale de Coordination des Actions de Prévention des Expulsions locatives). Sont appelés CCAPEX les commissions qui assurent le traitement des impayés de loyers. Depuis 2011, c’est la CAF qui joue ce rôle. Ces situations sont essentiellement dues à un surendettement dit « passif », c’est-à-dire engendré par un événement extérieur (non provoqué par le comportement de la personne elle-même, mais plutôt par une situation de chômage imprévu, etc).
Une mobilité coûteuse et une immobilité pénalisante
La périurbanisation s’est faite aussi avec la démocratisation des modes de transports et notamment le développement de la voiture individuelle. C’est pourquoi le périurbain, est souvent représenté comme étant le territoire de l’automobile. En effet, éloigné des centres urbains où sont concentrés emplois et services, la voiture individuelle devient une des conditions nécessaires pour se déplacer. Elle apparaît alors comme le prix à payer d’un éloignement, choisi, ou subi. Et ce prix à payer n’est pas neutre : il faut considérer l’achat du véhicule, mais également son entretien et son remplacement éventuel. Ainsi, l’absence de voiture dans ces territoires peut révéler et/ou aggraver une situation de pauvreté.
L’étude de la part des ménages véhiculés est éclairante sur ce sujet. Elle révèle que si les ménages disposent plus souvent d’une voiture à Ambérieu-en-Bugey qu’en moyenne sur la région, Elle révèle que, si la proposrtion des ménages qui disposent d’une voiture à Ambérieu est supérieure à la moyenne régionale, il n’en est pas de même sur Saint-Rambert-en-Bugey où seulement 77 % des ménages sont véhiculés. Et pourtant, Saint-Rambert-en-Bugey est davantage éloignée des services et bassins d’emplois et plus faiblement équipée en réseaux de transports publics.
Ainsi, les difficultés de mobilité sont manifestes sur cette commune.
L’accès à l’emploi, qui se situe principalement dans le PIPA, est uniquement accessible possible en voiture. Les gens viennent à Ambérieu-en-Bugey pour travailler dans la Plaine de l’Ain. Mais encore faut-il faut pouvoir s’y rendre. Et pour ceux qui ont un véhicule, ce sont souvent de vieilles voitures qui tombent en panne et qu’ ils n’ont pas les moyens de réparer. Il y a aussi beaucoup de monde qui roule sans assurance. Effectivement, l’acquisition d’un véhicule n’est pas suffisante, son entretien doit également être considéré et pris en compte financièrement.
Le frein de la mobilité vis-à-vis de l’emploi affecte également beaucoup les jeunes qui n’ont pas le permis et pour la plupart il s’agit d’une question financière. Quand ils travaillent sur Ambérieu-en-Bugey c’est un moindre mal, mais lorsqu’ils habitent sur les communes alentour c’est encore plus compliqué. C’est un véritable frein. Pour essayer de remédier à ce problème, la Mission Locale et l’association Envol ont mis en place un parc de 13 mobylettes et scooters qui peuvent être loués et sont facturés en fonction des revenus de la personne. Mais c’est bien loin des besoins réels.
La première conséquence des freins à la mobilité est que les habitants se cloisonnent géographiquement mais aussi et surtout socialement. Cela renforce l’isolement : quelqu’un qui n’est pas véhiculé ne s’en sort pas.
La fragilité de l’emploi sur les territoires
Vivre dans des territoires éloignés des centres urbains pose la question de l’accès à l’emploi. L’éloignement des villes-centres est souvent synonyme d’éloignement au bassin d’emploi. Cette distance à l’emploi renvoie ainsi aux problématiques de mobilité traitées précédemment. Plus l’éloignement est important, plus la dépendance à la voiture individuelle dans les déplacements domicile-travail va être forte.
Peu d’emplois sur place
Comme cela a été évoqué précédemment, ces deux communes sont situées dans un département économiquement dynamique. Mais sur place, peu de possibilité d’emploi s’offrent aux Rambertois et Ambarrois. Sur Ambérieu-en-Bugey, il y a trois importants pourvoyeurs d’emploi : la base militaire, la SNCF et EDF.
Mais ce vivier d’emploi s’est fortement réduit sur la commune ces dernières décennies. Par ailleurs de nombreuses entreprises ont fermé leurs portes. La mairie tente de stimuler l’implantation d’entreprises sur la commune mais le défi est ambitieux.
Toutes les fermetures depuis les années 1980 ont contribué à une augmentation de la précarisation. À Saint-Rambert-en-Bugey, peu d’emplois sont présents dans la commune, aujourd’hui, les entreprises BSM et TSM embauchent 50 et 20 salariés chacune. Ceci étant, les salaires sont au Smic.
Les jeunes sont également très touchés. Les données de la Mission Locale Jeunes viennent confirmer ce constat : « aujourd’hui on suit 29 % de jeunes de plus qu’il y a 4 ans. C’est très difficile de se faire embaucher car beaucoup d’entreprises fonctionnent uniquement en intérim ».
Les professionnels de la Mission Locale ajoutent que depuis quelques années, ils s’inquiètent de la situation de jeunes bacheliers qui sollicitent de plus en plus leurs services, mais l’offre proposée n’est pas adaptée.
Un vivier d’emploi plus présent sur la Plaine de l’Ain, mais des emplois trop souvent précaires
Face à la pénurie locale, beaucoup se tournent vers la Plaine de l’Ain qui apparaît a priori comme un pôle attractif pour l’emploi. Mais celle-ci connaît des limites par l’instabilité des emplois proposés et par l’isolement géographique de sa zone industrielle. Cela se répercute directement sur les travailleurs. Il y a beaucoup d’emplois à temps partiel, en CDD. En 2009, la commune de Saint-Vulbas abritant la PIPA enregistre une part de salariés en CDD, intérim, emplois aidés, apprentissage ou stage, supérieure d’environ 2 points à celle enregistrée sur le département. Les emplois salariés de la commune et, plus globalement, du département de l’Ain sont très fortement impactés par l’intérim.
Ainsi, si des emplois sont effectivement présents sur ce territoire, d’une part il faut pouvoir s’y rendre, et d’autre part, il s’agit souvent d’emplois instables favorisant la fragilité et donc la précarisation. Depuis le début de la crise économique et financière, ce territoire a particulièrement souffert : le chômage est dû à un fort emploi en intérim localisé dans la Plaine de l’Ain, et avec la crise des emplois ont été supprimés, ce qui participe au taux de chômage. Dans les entrepôts de la Plaine de l’Ain, il faut aussi mettre en relief la dureté du travail à l’usine. C’est souvent difficile et les gens qui travaillent là y sont parce qu’ils n’ont vraiment pas le choix et beaucoup lâchent prise, puis reviennent et ainsi de suite.
La prise en charge sociale des nouveaux pauvres
L’accès à un emploi précaire ne préserve pas de la pauvreté. Ce phénomène d’extension de la pauvreté aux travailleurs est bien visible sur ces deux communes. Les assistantes sociales constatent qu’elles ne touchent plus les mêmes personnes. Ce sont des populations précaires qu’elles ne voyaient pas avant, des travailleurs pauvres qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts. Depuis la crise, ça augmente en flèche. De la même façon, il faut souligner un appauvrissement des travailleurs indépendants : ce n’est plus aussi facile d’avoir le statut d’entrepreneur : si un client ne paie pas, à leur tour ils ne peuvent pas payer et ils ne s’en sortent pas. Il y a de plus en plus d’auto-entrepreneurs au RSA.
L’accès aux modes de garde : une difficulté supplémentaire particulièrement prégnante chez les familles monoparentales
L’instabilité des emplois de la Plaine de l’Ain, ainsi que les horaires en 2/8 ou 3/8 souvent proposés obligent les parents à trouver des modes de garde spécifiques pour leurs enfants. Et si la tâche n’est pas simple pour tous, elle l’est encore moins lorsque les revenus familiaux sont faibles ou lorsque la famille est monoparentale. D’autant que sur les deux communes, les places en crèche sont saturées. En ce qui concerne les modes de garde il y a une crèche sur Ambérieu-en-Bugey qui est en capacité de recevoir 50 enfants, et il y en a 80 sur liste d’attente. Si la réalité des difficultés d’accès aux modes de garde est prégnante sur tout type de territoire pour les familles pauvres, la spécificité des espaces périurbains lointains renforce encore ces difficultés avec notamment l’éloignement géographique du lieu de travail et la faiblesse du choix de mode de garde.
Nota : cet article s’est très fortement inspiré d’une étude publiée en juillet 2014 par la MRIE (Mission Régionale d’Information sur l’exclusion) que l’on peut télécharger sur internet.