Centrale nucléaire du Bugey : le salaire de la peur !
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La centrale nucléaire du Bugey est une des plus anciennes et des plus dangereuses de France avec celles de Fessenheim, Gravelines, Blaye et Tricastin. Régulièrement l’association « Sortir du nucléaire Bugey » manifeste pour dénoncer la mise en danger des populations locales. Mais il faut bien reconnaître que la mobilisation est faible même si ces militantEs ont raison de persévérer.
Pourtant nous savons que les habitantEs ont conscience des risques engendrés par l’industrie nucléaire. Ils savent et ont bien compris que la radioactivité de Tchernobyl n’a pas été arrêtée à la frontière française et qu’il y a eu mensonge d’État. Ils savent aussi que l’explosion des réacteurs de Fukushima n’est pas maitrisée et que là aussi l’État et l’entreprise Tecpno mentent, que des milliers de personnes subissent des radiations à plus ou plus hautes doses selon leur éloignement.
Alors pourquoi n’y a-t-il pas de mobilisation à la hauteur des enjeux dans le Bugey et la plaine de l’Ain face aux risques encourus ?
Une partie de la réponse est sans doute dans l’impact économique de la centrale qui engendre une sorte de soumission tacite teintée de fatalisme. On croise les doigts en espérant que le « nucléaire français » soit meilleur que celui des autres.
Pour bien comprendre il faut avoir en mémoire que sur le site nucléaire lui-même, en temps ordinaire, il y a 1 300 salariéEs d’EDF qui s’activent. Il faut y ajouter les 425 employéEs des entreprises prestataires de services. Et en 2013 il devrait y avoir une centaine d’embauches directes sur le site.
Pour améliorer sa rentabilité la centrale va investir 40 millions d’euros en 2013. Lors d’une visite décennale obligatoire par réacteur il y a besoin d’environ 1 500 à 2 300 personnes supplémentaires avec des dizaines de millions d’euros de budget à la clé. Cela donne une première idée de la puissance de persuasion économique et sociale des pro-nucléaires.
Les communes de Lagnieu, Meximieux et Ambérieu-en-Bugey sont directement impactées, sans compter tous les petits villages environnants. Ce sont des centaines d’emplois par commune et donc de logements, de clientEs pour les commerces, d’impôts locaux …
C’est aussi la mise à disposition des entreprises implantées dans le PIPA (Parc industriel de la Plaine de l’Ain) de disposer d’énergie à bon marché et facile d’accès et 4 900 emplois. Ce qui n’est pas rien dans un bassin de vie d’environ 160 000 habitantEs.
Mais ce sont aussi des taxes qui alimentent les caisses des collectivités locales : communes, intercommunalité et département. EDF paye environ 73 millions de taxes et redevances diverses à ces collectivités. Par exemple la Communauté de Communes de la Plaine de l’Ain reçoit 11 millions d’euros et la petite commune de Saint-Vulbas peut se payer un boulodrome de niveau international sans problème ni taxes supplémentaires pour les habitantEs. EDF participe aussi à la construction de 270 logements neufs d’ici à 2015 sur les communes de Lagnieu, Château Gaillard et Ambérieu-en-Bugey en prévision des embauches qu’elle doit effectuer.
Comment faire comprendre que l’intérêt collectif est mis en danger par l’industrie nucléaire alors que celle-ci dispose d’une telle force de frappe économique ? Et encore faudrait-il ajouter à cela la puissance des relais politiques dont dispose EDF. Nombre d’éluEs, maires, adjointEs et conseillèrEs sont agents ou retraitéEs EDF et de ses réseaux économiques. De plus, EDF incite ses cadres à se présenter aux élections locales par des heures de délégations et primes.
Honnêtement nous ne voyons pas ce qui pourrait faire évoluer la situation dans l’état actuel des choses, sauf à miser sur la politique du pire : l’accident nucléaire majeur. Ce que personne ne souhaite bien sûr.
Et pourtant ce risque est bien réel. Il faut avoir conscience que l’action des anti-nucléaires oblige aussi les pouvoirs publics et EDF à maintenir un niveau de surveillance et de sécurité le plus élevé possible. Dès qu’il y a une baisse de la contestation, le lobby nucléaire en profite pour faire des économies sur la sécurité.
Ce qui n’empêche pas d’expliquer qu’il faut et qu’il est possible d’arrêter immédiatement le nucléaire civil et militaire.