À propos des indignés d’Ambérieu

mardi 10 février 2015
par  Gia

Les militant-e-s de la CLA partagent un projet commun et se reconnaissent dans les principes fondateurs de notre coordination. Nous ne sommes pas pour autant une organisation monolithique : nous pouvons avoir des points de vue différents sur les mouvements sociaux auxquels nous participons. C’est pourquoi nous publions deux articles sur le mouvement des indignés d’Ambérieu.

Aoûti 2011

Un peu partout en France, à l’image du mouvement du 15 mai espagnol, se sont tenus des rassemblements pour la démocratie réelle. En référence à Stéphane Hessel, les participant-e-s ont pris le nom d’indignés. Après Paris, Lyon et d’autres villes de Fance, Ambérieu-en-Bugey a vu l’espace public s’ouvrir aux indignés. Même si l’échelle est différente (une cinquantaine de personnes au maximum), le mouvement ambarrois présente des points communs avec les assemblées qui ont émergé dans d’autres communes. On y trouve à la fois des éléments qui peuvent intéresser le mouvement libertaire et d’autres plus discutables.

Quel est l’intérêt de ces rassemblements ?

La caractéristique la plus marquante et la plus intéressante de ces assemblées réside dans le souci d’auto-organisation qui s’est manifesté dès le début. Les individus qui se sont regroupés sur les places ont essayé de faire vivre une certaine forme de démocratie directe : liberté de parole, prises de décisions collectives, refus de tout leadership. C’est grâce à cette liberté qu’ont pu se rencontrer des personnes issues de différents milieux et sans expérience militante. Les assemblées (quotidiennes, puis hebdomadaires) ont ainsi permis l’échange d’idées et la confrontation de points de vue. Malgré la diversité des positions qui se sont exprimées, deux points ont fait l’unanimité lors de ces rassemblements : (1) la volonté d’indépendance envers les partis politiques et les syndicats ; (2) le désir de trouver des solutions nouvelles pour transformer le monde. Il y a donc, dans ce mouvement des indignés, une tendance spontanément libertaire qui suscite tout notre intérêt. Cependant, il présente aussi certaines limites qui risquent de peser sur son avenir.

Quelles sont les limites de ce mouvement ?

En premier lieu, le mouvement des indignés est apparu de façon artificielle, à l’imitation du mouvement espagnol, sans être ancré dans des luttes existantes. De ce fait, les questions se sont souvent posées de façon abstraite et non dans la dynamique d’un conflit. S’il ne s’agit pas pour nous d’opposer différentes formes d’action, il nous semble néanmoins utile d’établir une comparaison avec le Collectif départemental pour la grève générale. Ce dernier s’est constitué en 2009 lors d’un mouvement de grève. Au cours des assemblées générales, la démocratie directe, l’auto-organisation ont été mises en débat de façon concrète et non abstraite : il s’agissait de prendre des décisions collectives pour radicaliser et étendre une lutte en s’opposant aux diktats des bureaucraties syndicales. Or, pour beaucoup d’indignés, la démocratie directe n’a été abordée que sous son angle le plus formel, c’est-à-dire comme une forme qui serait indépendante de son contenu. Certes, il est essentiel que les individus débattent et prennent des décisions collectives, mais pour décider quoi ? Dans quel but ? C’est dans cette absence de perspective claire que nous semble résider une des limites de ce mouvement d’indignation. La cause est à chercher dans sa dimension citoyenne (et, là encore, la référence implicite à Hessel semble évidente). S’affirmer comme citoyen, c’est se définir comme membre de la communauté politique. Or, dans une société divisée en classes sociales antagoniques, il n’existe pas de communauté politique. Il n’existe que des intérêts de classe, que le citoyennisme vise précisément à masquer. C’est dans le cadre de la lutte des classes, de la lutte du prolétariat contre le capital, que les concepts de démocratie directe ou d’autogestion prennent tout leur sens.

En refusant de s’inscrire dans une perspective de classes, le mouvement des citoyens indignés oscille entre des revendications social-démocrates (démocratie participative, contrôle citoyen, taxation des richesses) et un projet libertaire (communisme, autogestion, abolition de l’État).

Et les militant-e-s de la CLA ?

En tant que militant-e-s libertaires, nous ne saurions nous cantonner au rôle d’observateurs extérieurs des luttes en cours. La CLA a participé et participera aux rassemblements des indignés. Notre présence lors des débats doit viser : (1) à faire connaître nos idées (autogestion, lutte des classes, communisme libertaire, etc.) ; et (2) à aider dans la mesure du possible à la convergence avec les luttes en cours (dans les entreprises locales ou das les services publics).

Août 2011