Préparatifs pour une contre révolution préventive étatique

mardi 10 février 2015
par  Bernard

Contrairement à ce que le niveau de combativité actuel laisse penser, nous ne sommes sans doute pas loin du déclenchement d’une agitation sociale quelque peu incontrôlée. Beaucoup d’éléments vont dans ce sens : impasse politique de la gauche qui nous annonce déjà les futurs plans de rigueur de 2012, développement de la misère, chômage massif même s’il est en partie maquillé, augmentation du surendettement de 12% en six mois en 2012, baisse des aides publiques aux plus démuni-e-s, augmentation du coût de la vie dans tous les domaines, crise du logement social, montée en puissance d’une extrême-droite violente avec un cynique laisser-faire gouvernemental, contexte économique international déplorable, diffusion de situations quasi insurrectionnelles dans plusieurs pays arabes qui inquiète tous les pouvoirs, mouvements des indigné-es en Espagne, en Grèce, agitation populaire en Grande Bretagne… Face à cette accumulation de mal vivre, voire de révoltes contenues, en France, aucune organisation politique ou syndicale institutionnelle ne semble être en mesure de catalyser ces mécontentements qui vont bien finir par trouver une expression collective.

L’appareil d’État, gauche et droite confondues, a conscience de ces risques d’explosion sociale et a aussi tiré un bilan des exemples précédents de Grenoble l’année dernière et de Villiers-le-Bel il y a cinq ans (le procès en appel des insurgé-e-s a lieu à la rentrée). En conséquence, et alors que tout semble calme, des décrets et lois sont votés en toute discrétion, permettant de renforcer, s’il était besoin, l’arsenal juridique autorisant une violence d’État presque sans limites :

1) le 30 juin 2011, l’utilisation d’armes à feu (fusil d’assaut avec balles de calibre 7,52 y compris lunette de visée — c’est une arme de guerre) est autorisée contre des manifestant-e-s, même s’ils ou elles sont désarmé-e-s. C’est la suite logique des émeutes de ces dernières années qui ont vu des tirs isolés contre les forces de police. Mais la généralisation légale n’était pas nécessaire, les lois existantes à ce jour permettent déjà beaucoup de choses.

2) vote d’une loi le 7 juillet 2011 pour une nouvelle carte d’identité sécurisée, gratuite, qui aura deux « puces électroniques », l’une régalienne avec les données biométriques, l’autre sur option permettant aux internautes de s’identifier en ligne. Le tout sera géré par un même fichier TES (titre électronique sécurisé), y compris pour les passeports. Nous vous laissons imaginer ce que cela peut donner comme dérives… 45 millions de personnes sont concernées.

3) depuis le 11 juillet 2011, les textes de lois du code de la défense deviennent le code de la sécurité nationale. C’est loin d’être anodin, dans le climat sécuritaire ambiant, et cela cible sans aucun doute l’ennemi intérieur plus qu’une puissance étrangère.

4) renforcement d’un article de la loi LOPPSI 2 par une loi facilitant l’utilisation des réservistes mobilisables ponctuellement pour des périodes de trente jours renouvelables. Cela concerne la police, la gendarmerie, la protection civile, etc. et est applicable en cas de crise majeure, sans aucune définition précise (le prétexte officiel est la catastrophe de Fukushima). Ces citoyen-nes volontaires ressemblent fort à des milicien-nes étatiques tel que le DAL parisien (Droit Au Logement) en a fait l’expérience début juillet 2011. Une manifestation devant la mairie du XIe arrondissement a été dispersée par une bonne trentaine de gros bras avec brassard Police ressemblant plutôt à des nervis fascisants, vocabulaire à l’appui. Ce sont sans doute les Ben Ali et autres Moubarak qui leur ont soufflé cette idée de salopard.
Et nous ne sommes pas sûrs d’être à jour dans cette préparation à l’affrontement d’un État toujours plus au service des puissant-es. Tant qu’il y aura de l’argent, il n’y en aura jamais assez pour tout le monde, dit un vieux dicton. Et s’il faut tuer cent mille personnes pour s’en accaparer le maximum, soyez sûrs que cela sera fait, puisqu’ils le font déjà pour du pétrole, de l’uranium, du blé ou de l’eau… Le terrorisme d’État est aussi une réalité. Nous avons trop tendance à croire que les gens de pouvoir sont civilisé-e-s. Mais rien n’est vraiment sûr…

Août 2011