Voline : La révolution inconnue
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Ce texte de Voline (1882-1945) est à la fois l’œuvre d’un théoricien et historien de l’anarchisme et d’un militant et combattant libertaire.
La Révolution Inconnue retrace les différentes étapes de la révolution russe : des prémices en 1825 à son écrasement par les bolcheviks en 1921. L’auteur ne décrit pas cette époque en témoin extérieur, mais en acteur : il participe en 1905 à la fondation du premier soviet à Saint-Pétersbourg, est rédacteur du journal anarcho-syndicaliste Goloss Trouda , lutte en Ukraine aux côtés de l’armée noire de Makhno avant de s’exiler en 1922 après avoir été condamné à mort par Trotsky.
Le livre de Voline comporte trois parties. La première - Naissance, croissance et triomphe de la révolution (1825- 1917) - montre comment la lutte politique contre l’autocratie tsariste se modifie progressivement : du mouvement dékabrsite (qui cherchait à instaurer une démocratie bourgeoise) aux soviets, un pas est franchi. On passe de la simple revendication politique à l’exigence d’une révolution sociale. Le soviet, ou conseil ouvrier, reste la plus belle invention de cette période fructueuse. L’avant-gardisme menchevik (social-démocrate) et bolchevik (sous la coupe de Lénine) considérait les masses comme un troupeau qu’il fallait éduquer et organiser pour les diriger autoritairement vers un but qu’elles seraient incapables de concevoir par elles-mêmes. Le soviet surprit tout le monde : forme d’auto-organisation spontanée ( dans un pays où les syndicats étaient quasi-inexistants), il préfigure une société sans État, dans laquelle les individus librement associés se fédéreraient pour tenter de vivre ensemble. La deuxième partie de La Révolution Inconnue (Le bolchevisme et l’anarchie) oppose deux conceptions de la révolution sociale. On y voit comment les bolcheviks s’acharnent à vider les soviets de leur substance. L’auto-organisation spontanée fédéraliste se mue en un simple rouage de l’État-Parti : une Union des Républiques Socialistes Soviétiques.
La troisième partie du texte de Voline ( Les luttes pour la véritable révolution sociale) retrace les tentatives désespérées du prolétariat russe pour maintenir son autonomie vis-à-vis du totalitarisme imposé par Lénine et ses sbires : révolte du soviet de Kronstadt ( réprimée par l’Armée Rouge sous la direction de Trostky), luttes en Ukraine avec la makhnovtchina.
Certains s’indignèrent tardivement de ce que Voline nommait le fascisme rouge. L’intelligentsia bourgeoise fera de Trotsky une référence révolutionnaire : contre un Staline qui aurait perverti l’idéal communiste, le trotskysme serait censé incarner la pureté du projet révolutionnaire. Voline montre au contraire comment, dès 1917, s’instaure en Russie un capitalisme d’État fondé sur l’exploitation du prolétariat : « Staline « n’est pas tombé de la lune ». Staline et le « stalinisme » ne sont que les conséquences logiques d’une évolution préalable et préparatoire, elle-même résultat d’un terrible résultat, d’une déviation néfaste de la Révolution. Ce furent Lénine et Trotsky - c’est-à-dire leur système — qui préparèrent le terrain et engendrèrent Staline. Avis à tous ceux qui, ayant soutenu Lénine, Trotsky et consorts, fulminent aujourd’hui contre Staline : ils moissonnent ce qu’ils ont semé ! ». La Révolution Inconnue, Tome II.